Adapter différentes mesures fiscales à la réalité des scale-ups québécoises
January 29, 2025
Par Jean-François Harvey,
Directeur pour le Québec du CCI
Il y a un an, lorsqu’il a déposé le budget du Québec 2024, le ministre des Finances Éric Girard a annoncé qu’il entamait un examen de toutes les dépenses fiscales du gouvernement.
Le ministre Girard a alors déclaré que l'objectif était de s'assurer que l’argent des contribuables soit dépensée de manière efficiente et génère un maximum de valeur pour l’économie québécoise. Il avait également annoncé l'harmonisation de plusieurs crédits d'impôts dédiés au secteur technologique, une mesure saluée par le CCI.
L'Assemblée nationale du Québec a repris ses travaux cette semaine, ce qui signifie que le ministre Girard présentera bientôt son budget 2025, et nous suivrons de près les résultats de son examen des dépenses. Dans un récent discour, M. Girard a déclaré que le Québec accusait un retard en « recherche, développement et innovation ». Il a ajouté qu'il préparait une « réponse fiscale » pour améliorer la situation. Cette déclaration m’apparait très encourageante pour la suite des choses.
Le CCI soutient pleinement cette approche, et notre mémoire pré budgétaire soumis au ministère des Finances contient plusieurs propositions susceptibles d’aider le gouvernement à mieux performer en matière d’innovation.
Adapter les critères d’admissibilité du crédit d’impôt capital synergie à la réalité des entreprises technologiques du Québec
Cette mesure fiscale vise à encourager les partenariats d'affaires et la synergie entre les entreprises québécoises. Elle permet à une grande entreprise bien établie de bénéficier d’un crédit d’impôt lorsqu’elle investit dans une entreprise plus petite, en croissance et innovante. C’est un excellent moyen d’encourager la prise de risques et de stimuler les investissements.
Cependant, les critères d’admissibilité sont très restrictifs et mal adaptés aux réalités des entreprises technologiques. Les critères spécifiques sont complexes et techniques, mais en résumé, dans sa forme actuelle, la majorité des entreprises innovantes ne se qualifient pas, ce qui empêche cette politique d’atteindre son objectif. Nous proposons les améliorations suivantes :
- Éliminer l’obligation pour une entreprise d’exercer des activités au Québec pour cette année d’imposition représentant au moins 75% de l’ensemble de ses activités en tant que critère d’admissibilité;
- Augmenter le seuil de capital versé maximal de 15M$ à 30M$;
- Augmenter le seuil de revenu brut maximal de 10M$ à 20M$.
Rendre le crédit d’impôt pour le développement des affaires électroniques (CDAE) plus généreux pour les entreprises ayant leur siège social au Québec
Bien qu’il était souhaitable d’harmoniser les différents crédits d’impôts du secteur technologique, on se retrouve, à terme, à augmenter la portion non-remboursable du CDAE. Incidemment, on se retrouve donc à priver nos entreprises en expansion de capital essentiel à leur développement.
Le cycle de développement d’une entreprise technologique est souvent lent. Il peut s’écouler une décennie avant qu’une entreprise ne génère des profits imposables. De plus, on crée en quelque sorte une compétition inégale, car les grandes entreprises étrangères peuvent facilement effectuer différentes manœuvres fiscales afin de bénéficier au maximum des différents programmes et crédits du Québec, tandis que les scale-ups se retrouvent laissées pour compte. Nous recommandons donc de :
- Rendre le crédit d’impôt pour le développement des affaires électroniques (CDAE) entièrement remboursable pour les entreprises ayant leur siège social au Québec.
Permettre aux entreprises technologiques québécoises d’émettre des actions accréditives
Le cycle de développement d’une entreprise technologique est souvent plus long que celui d’une entreprise traditionnelle. En raison de l’incertitude liée aux découvertes ou aux revenus, il est extrêmement difficile pour les entreprises de ce secteur de se financer par des prêts bancaires traditionnels.
Dans le secteur des ressources naturelles, un autre domaine de l’économie avec des délais de développement importants et des besoins d’investissement initiaux massifs, le gouvernement a reconnu ce problème et développé une solution politique.
Essentiellement, les actions accréditives permettent aux investisseurs de financer des startups tout en bénéficiant d’un traitement fiscal avantageux sous certaines conditions. Cette structure financière est un facteur clé qui a permis au Canada de développer son secteur des ressources naturelles et en faire un pilier économique pour le pays.
Cette réalité est très similaire à celle du secteur technologique, où il n’est pas rare d’attendre plus de dix ans avant qu’une entreprise puisse espérer atteindre la rentabilité. Il semble donc logique de permettre aux entreprises technologiques d’émettre des actions accréditives pour stimuler leur croissance et diversifier leurs sources de capital.
Ces trois mesures assureront un meilleur soutien aux entreprises technologiques locales, leur permettant d’avoir accès à davantage de capital aux moments clés de leur développement. La preuve n'est plus à faire que les scale-ups du secteur des techs sont un ingrédient essentiel afin de générer une croissance économique durable et des avantages économiques significatifs.
Notre mémoire pré budgétaire 2025 contient plusieurs propositions ambitieuses pour améliorer le soutien à l’innovation au Québec. Vous pouvez le consulter ici.
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